Si tout le monde possède au moins une chemise dans sa garde-robe, pas facile d'avoir une idée précise de comment celle-ci est faite. C'est ce sujet auquel nous allons tenter de répondre avec le plus d'honnêteté possible, un maximum de détails et des photos prises sur le vif dans notre atelier à Casablanca.
L'idée ici n'est pas de vous marketer au maximum une chemise mais bien de comprendre chaque étape d'une façon industrielle et du savoir-faire qu'elle contient.
Nous avons déjà vu par le passé comment se fabriquait le tissu (si vous l'avez raté c'est ici). Celui-ci arrive par rouleau, des rouleaux qui sont habituellement de 60 mètres, sur une largeur (la laize) toujours la même. En Europe celle-ci fait 140 ou 145cm, mais elle est parfois réduite sur d'anciennes machines (notamment au Japon).
On fera naturellement attention à prendre en compte ces contraintes lors de la coupe du vêtement, afin de maximiser l'utilisation du tissu et de minimiser les pertes. Une chemise classique dont la découpe est bien optimisée utilise ainsi entre 1,50 et 1,70m (toujours sur 140cm de largeur). Quand on utilise un tissu entre 8 et 15€ par mètre, en voici une mesure importante!
Le choix d'Office Artist: tous nos tissus (popeline, twill, oxford, fil-à-fil, etc.) viennent du tisseur italien Albini, donc sont sur une laize de 140cm. Référence depuis plusieurs siècles, Albini est la garantie de tissus de qualité (le plus souvent avec des titrages de 120 et en double retors) qui permettent d'obtenir des chemises agréables et résistantes dans la durée.
Pour une question d'efficacité, vous imaginez bien qu'on ne découpe pas les chemises une par une, mais que l'on essaie de les rassembler par modèle pour couper toutes les pièces en même temps. A la réception il s'agit donc de bien répertorier quel tissu va avec quel autre et quelles sont les propriétés de chacun pour savoir s'ils doivent être lavés, ou préparés différement.
Le choix d'Office Artist: dans le but d'obtenir le maximum d'efficacité et un rapport qualité-prix aux petits oignons, nous sélectionnons quasiment exclusivement des tissus qui ne bougent pas après le montage et n'ont donc pas besoin d'être lavés.
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Comme son nom l'indique, le matelassage est le principe qui veut que l'on superpose les tissus afin de pouvoir les couper ensemble. Si ce principe empêche une découpe très précise des gros motifs (en vue de raccorder ensuite), il permet d'économiser un temps humain précieux puisque l'on peut découper ainsi un grand nombre de chemises en même temps.
Si cette étape permet d'économiser du temps, elle en prend également: un seul faux pli dans votre tissu et votre travail est gâché. On utilise ainsi des fers, presque comme des fers à repasser (voir photo), pour s'assurer que le tissu ne bouge pas même si on le manipule.
Avant de s'attaquer à la découpe elle-même il convient de savoir quels sont les besoins exacts de cette production, c'est-à-dire les quantités par taille, ainsi que la mesure de chaque pièce qui composera la chemise. On fait ainsi appel à des logiciels de patronage précis qui permettent de déposer virtuellement sur le matelas chaque pièce, tout en minimisant les pertes mais en respectant les quantités par taille. Ainsi la manche d'une chemise en 42 peut très bien être découpée juste à côté du col d'une chemise en 37. L'important dans ce puzzle étant qu'à la fin chaque chemise ait bien tous ses ingrédients.
Vous voyez ici le résultat de ce travail: un patronage imprimé que l'on va mettre sur le matelas de tissu afin d'indiquer au couper où il doit passer sa scie.
La découpe elle-même est un travail long et précis. Dangereuse car directement faite à la scie, elle requiert un grand doigter et surtout un maximum de sécurité pour ne pas se couper. L'utilisation des gants est ainsi obligatoire.
Chaque pièce de tissu découpée doit être mise de côté pour ne pas être perdue.
Celles-ci sont précisément indexées et notées: elles pourront ainsi être réparties entre plusieurs couturiers, sans que celui-ci ne se trompe ou perde de temps à trouver quelle pièce va avec quel pièce, voire dans quel sens l'utiliser.
Pour obtenir une chemise parfaite, il convient de rigidifier certaines parties: on pense notamment au col et aux poignets. Pour cela, on utilise du thermocollé. Le thermocollé est un tissu plus rigide qu'un tissu classique, il est le plus souvent fait de matière synthétique et présente un côté avec de la colle. Appliqué contre le tissu que nous venons de découper, il se collera à lui, tout en lui donnant plus de tenue.
Comme un tissu classique, le thermo est découpé à la scie de manière à s'adapter à la taille de chaque pièce de la chemise. Il ainsi une taille et une fonction comme n'importe quel morceau de la chemise.
Très simplement sur le principe, mais il a quand même besoin d'une machine pour être utilisé. Pour coller le thermocollé à un tissu classique, il faut le chauffer à haute température de manière à ce que la colle qu'il contient fonde et se colle sur le tissu.
C'est le phénomène inverse qui peut arriver avec un mauvais thermocollé (oui, sur les chemises disponibles dans les grandes chaines): à force de lavages, le thermo se décolle et cela crée des cloques visibles à l'oeil nu. Bref, une chemise difficilement utilisable.
Sur la photo ci-jointe, on voit le tapis sur lequel on pose le thermo et le tissu, avant de le faire passer à haute température.
Le thermocollé n'est collé au tissu que d'un seul côté. Cela donne plus de flexibilité à votre col ou à votre poignet. Vous pouvez ainsi regarder sous votre col ou à l'intérieur de votre poignet, vous verrez que le tissu est libre à cet endroit, qu'il est juste cousu et que vous pouvez l'attraper.
Le col ou le poignet, muni de son thermo, rejoint le reste des pièces de la chemise avant le montage.
Si cette étape parait simple et logique, elle est décisive pour que l'ouvrier qui monte la chemise ne perde pas de temps à trouver les pièces dans l'ordre, dans le bon sens mais aussi qu'il ne se trompe pas de taille.
Il est ensuite indépendant pour monter quasi-entièrement une chemise.
Une étape cruciale : l'assemblage! Elle consiste à coudre toutes les parties de la chemise ensemble pour donner vie au vêtement. On commence par les plus petites parties (col, poignets) avant de joindre ensemble les grandes. Les parties les plus périlleuses sont naturellement les manches à joindre avec le buste et le dos car ce sont deux arrondis à faire communiquer sans faire froncer le tissu.
Il est loin le temps où les boutons étaient cousus à la main. Avec l'aide de machine on peut aujourd'hui les coudres plus rapidement et s'assurer que leur couture est solide. Cependant, un bouton restera toujours un bouton cousu et une extrêmité du fil doit bien arriver quelque part. Il peut ainsi arriver que des fils dépassent, voire dans un cas de malchance que le bouton se défasse, mais avec un fil et une aiguille pas besoin de beaucoup de temps pour remettre tout en ordre. Si par hasard un bouton cassait ou disparaissait, toutes les marques fournissent des boutons supplémentaires sur les étiquettes de composition ou sur l'avant de la chemise.
Pour éviter tout fil qui dépasse ou soucis de taille, un contrôle qualité a lieu à la sortie de la confection. Une personne est en charge de regarder votre chemise sous tous les angles et de vérifier ses principales dimensions. Elle retire ainsi les fils qui dépassent et s'assure que la chemise est conforme à sa fiche technique.
Avant-dernière étape pour une chemise parfaite, un bon coup de fer à repasser pour qu'elle vous arrive de façon impeccable. Cette étape permet également de faciliter le pliage en vue de l'emballage.
Avez-vous déjà essayé de replier une chemise comme elle vous a été livrée? Oui, c'est une gageure! A l'atelier, l'expérience, le coup de repassage et des gabarits bien ficelés permettent d'emballer les chemises en un temps record avant de les mettre sous cellophane puis de les expédier vers la France en camion.